samedi 4 mai 2013

Stupeur et ronflements



Chers amis et Gabs,

je dois vous annoncer à tous que je ne me lasse pas de vos messages d'admiration. Soyez sans crainte, tout votre courrier est lu et mon assistance devrait bientôt vous faire parvenir vos photos dédicacées.

Il semblerait que parmi vous, un pourcentage non négligeable soit littéralement fan de mes récits de voyage et m'en réclame chaque jour davantage. J'ai donc décidé de profiter de ce samedi qui, bien que prometteur quand je me suis levé dès potron-minet (10h49), vient de se couvrir et me permets de buller à l'intérieursans ressentir la moindre once de culpabilité pour vous raconter mon périple du mois d'Avril en Irlande.

Lors de la célébration de cette délicieuse fête qu'est Noël, mon jeune frère Mathias (que les lecteurs d'un ancien site web devenu culte connaissent déjà) me parle, entre deux bouchées de cochon de lait farci aux cèpes, de la chaussée des géants. Je ne sais plus comment le sujet est arrivé sur le tapis persan (il me semble que nous parlions de cette excellente série Game of Thrones et de ses lieux de tournage) mais bref, je lui dis que je ne vois pas du tout de qui il parle et ce dernier m'explique qu'il s'agit d'un site naturel d'origine volcanique composé de milliers d'hexagones réguliers et qui forment une espèce de chaussée un peu casse-gueule comme le début de la rue Leyteire que je vous déconseille d'emprunter à vélo un jour de pluie sauf si vous voulez tourner une séquence de Jackass. Cette dernière phrase étant hyper longue, je reprends mon souffle. L'endroit se situe sur la côte de l'Irlande du Nord, endroit que mon esprit associe avec moutons, pluie, whisky et avec la ville de Belfast.

Aaah Belfast... J'avais lu il y a deux ans un livre qui m'avait pas mal marqué. Il s'agit d' Eureka Street de Robert McLiam Wilson, roman choral en pleine période de troubles faisant intervenir tout un tas de personnages plus attachants les uns que les autres et donnant même envie de réécouter Zombie des Cranberries. J'aime beaucoup voyager dans les villes ou endroits qui furent le lieu d'action de lires que j'ai aimés, ce qui me permet une visite et une exploration plus intimes et personnelles et me replonge dans le bouquin. Bref, j'avais envie de voir Belfast depuis un certain temps.

Ainsi, en ce début d'année 2013, la lumière jaillit dans mon encéphale. Je précise à mes lecteurs que je n'utilise aucun dictionnaire de synonymes. Mon cher ami Guigui a justement l'occasion de se rendre régulièrement dans la capitale Nord-Irlandaise pour voir sa petite amie qui passe une année là-bas et il veut également me rendre visite à Stockholm. Le jeune Mathias doit assister à une semaine de conférences au Royaume-Uni au printemps. Ni une, ni deux je mets sur pieds un petit programme qui m'excite au plus haut point.
Guigui vient passer quelques jours à Stockholm, nous partons tous les deux depuis la Suède pour Dublin avec Aer (Cuni)Lingus - bonjour la finesse sur ce blog! - où Mathias nous rejoint. Après quelques bières dans Temple Bar, nous prenons la route pour Belfast où la petite amie déjà mentionnée - Coralie, de son prénom - nous rejoint pour un road trip sur la côte. Emballez, c'est pesé.

Au fur et à mesure que les jours rallongent (si c'est sympa de pouvoir aller picoler en toute légitimité à 17h car il fait déjà nuit depuis deux heures, il faut reconnaître que ça fatigue), nous convergeons vers cette fameuse semaine d'Avril, mois où à Stockholm l'expression, ne te découvre pas d'un fil prend tout son sens. Je rajouterais même sors pas de chez toi c'est inutile.

Ainsi Guigui arrive donc en Scandinavie avec sa bite et son couteau et notre ami commun Mickaël qui s'est incrusté à cette partie du projet. Ne voulant pas faillir à ma réputation, je leur fais faire le tour du proprio version grande classe. Dégustation de renne dans mon resto préféré , balade sur les quais, petite bière en terasse à Skeppsholmen sous 18 couches de couvertures en polaire (qui nous rappellent à Guigui et moi de bonnes pommes passées sous le plaid, avec une tisane devant les Simpsons mais je m'égare de l'Est) et le soleil (que j'avais réservé pour l'occasion 6 mois à l'avance) est au rendez vous. Je les laisse même me battre au Scrabble. Grand Prince. Le week-end de 4 jours passe à toute vitesse.
Petit hic à ce début de séjour idyllique, ces chers messieurs et surtout un - dont je tairais le nom mais qui n'est pas Mick - ronflent. Mais pas le petit bruit sympathique qui peut en certaines circonstances vous bercer. Non non non. Plutôt le bruit d'une cafetière à filtre quand il n'y a plus que quelques gouttes d'eau dans le réservoir et que l'aspiration fait trembler toute la cuisine.
Autant vous dire de suite, je ne dors pas pendant 4 nuits. Même avec mon casque anti bruit. Faisant contre mauvaise fortune bon coeur, je me surprends à rêver tout simplement d'une nuit au calme dans un lit douillet et même à me dire qu'il est hors de question que je dorme avec qui que ce soit pour les cent ans à venir, y compris une jolie irlandaise (de toute façon une jolie irlandaise c'est un mythe).

Le dernier jour de ce chapitre suédois de nos aventures arrive. J'ai un peu de travail (oh ça va hein, il m'arrive de temps en temps de travailler une heure ou deux hein c'est bon!) et je propose donc à mes amis d'aller faire un tour à Uppsala mandre - jolie petite ville universitaire à 70 km de Stockholm - et de se retrouver en fin d'après midi pour quelques bières et soyons fous, un petit dîner. Mes amis en ayant déjà marre des pommes de terre et du hareng fumé, nous optons pour un resto italien que j'adore, notamment pour ses Linguine alla Vongole (un de mes plats préférés, notez le chers lecteurs pour l'éventuelle fois où je vous ferais l'honneur de venir chez vous). Le planning adopté, nos chemins se séparent pour mieux se retrouver plus tard (dans 20 ans cette phrase sera étudiée en classe de 4ème).

Seulement voilà, je finis mes petites affaires à l'heure du fika et ayant rendez-vous avec les autres zouaves vers 17h30, je décide d'aller à la session hebdomadaire de floorball de 16h, sport national dans lequel je me suis pas mal investi au long de l'hiver et que j'affectionne de plus en plus tout en restant aussi mauvais. Si mon jeu est en effet celui d'un débutant, il arrive que je m'en sorte pas mal. Mais pas cette fois. Le manque de sommeil des nuits précédentes se fait sentir dans tout mon corps qui peine à se mouvoir avec son aisance habituelle et je suis en retard sur pas mal d'actions. Et naturellement, le drame arrive. 57ème minute de jeu. La tension est à son comble. Il reste 3 minutes et nous perdons. Ayant réussi à me dégager de la défense adverse, un coéquipier me passe la balle. Faisant preuve d'une abnégation totale, je donne mes dernière forces pour courir jusqu'au but, la balle au bout de la crosse que je fixe sans regarder autour de moi. Bam. C'est le choc. Mon front heurte le front d'un défenseur viking portant un casque à pointes. Je m'écroule. Le public retient son souffle. J'essaie de me relever complètement groggy mais je suis couvert de sang. Les joueurs s'affolent. On m'aide à quitter le terrain. Les gens me conseillent de ne pas regarder la blessure, je suis apparemment salement amoché et il faut que j'aille aux urgences. Deux suédoises avec qui nous jouons me prennent en charge; elles appellent un taxi et me mettent un premier pansement.
J'arrive à l'hôpital et un chirurgien m'affirme que des points ne sont pas nécessaires, il évacue le sang sous l'hématome et me colle la blessure avec des steril strip et protège la plaie à l'aide d'un gros pansement. Je me regarde dans une glace. Je ne me reconnais plus, je suis affolé, j'ai peur de ressembler à Frank Ribery. Le lendemain, l'Equipe titrera Le front en pendentif.


Je retourne au bureau récupérer mes affaires. Mon collègue Tony, irlandais qui ne manque pas d'auto-dérision, me rassure. D'après lui cette blessure m'aiderai à me fondre dans la masse en Irlande et à passer pour un local. Il est grand temps de trouver un autre type de réconfort, je rejoins mes deux amis et nous allons illico presto déguster du vin rouge italien et autres mets pas dégueux. Je me couche mais je dors une fois de plus très mal. Si les ronflements sont toujours présents, c'est surtout mon pansement qui me gène, les positions sur le coté tirent dessus et il m'est clairement impossible de me mettre sur le ventre. Je n'ai plus qu'à mourir. Le sommeil me gagne. Je n'entends même pas Mick qui part à 4h du matin pour prendre son vol de 6h30 pour Paris.

Après un peu de rangement et un smoothie à la banane et aux baies d'argousier, Guigui et moi partons pour la raie au port. Le douanier me demande ce qui m'est arrivé. J'ai envie de lui répondre que je dissimule des explosifs sous mon bandage mais je m'abstiens. J'ai l'impression que tout le monde me regarde. Une petite fille dans l'avion me dévisage avec stupeur me montre du doigts et regarde sa mère avec inquiétude. Je décide de lire un peu. Je finis le décevant La grande embrouille d'Eduardo Mendoza, 4ème volet d'une série que j'avais pourtant beaucoup aimée.


Nous arrivons dans la capitale irlandaise. Tout est vert. Jean-Michel Larqué serait ravi. Nous récupérons la voiture que j'ai réservée au comptoir Hertz, Hertzé parti. On dirait un calembour de Gabs. La première étape du voyage s'avère être un charmant bed and breakfast dans un quartier un peu excentré mais proche de la mer et plutôt cossu. Nous prenons le DART, équivalent du RER, qui rejoint le centre de Dublin en 10 minutes. Nous nous dirigeons direct dans Temple Bar, centre névralgique de la ville où s'alignent pubs, pubs et pubs. Le problème est d'en choisir un. Le truc bien c'est qu'une pinte délicieuse ne coûte pas un mois de loyer comme en Suède. Mon acolyte me propose de dîner dans un resto qu'il a testé lors d'une précédente visite. Il s'agit de cuisine du Népal. Le plat s'appelle un Dal et ça tombe bien car j'ai l'estomac dans les talons aiguilles. Les serveurs sont tous beaux. Guigui m'explique que c'est pas qu'ils sont nés pas laids. Je reconnais en mon ami le rédacteur des blagues carambar.
Il est rapidement l'heure pour lui de se diriger vers la station de bus car il part dès le soir même pour Belfast rejoindre sa dulcinée. Je l'accompagne pour une promenade digestive le long de la Liffey et le dépose devant la fameuse aiguille de Dublin, monument phallique incontournable. Je regagne mon hôtel, seul, le pas léger et m'écroule sur mon lit et enfin, je dors.

Cette nuit de sommeil profond et ininterrompu me fait Dublin (depuis le temps que je veux caser cette blague...) et après quelques oeufs pochés déglicieux, je vais me promener sur la plage en attendant l'heure d'aller chercher mon punk de frère à l'aéroport car ce dernier arrive de Bristol (igo élément). Je récupère donc le colis qui a hâte de se rendre downtown au plus vite, ce que nous faisons, évidemment.
J'ai entre temps enlevé mon pansement et découvert une cicatrice qui ne me paraît pas si vilaine mais que mon frère qualifie tout de go de balafre. 
Après un petit tour du centre nous salivons à l'idée d'une petite bignouze. Ni une ni deux, nous voilà dans le beer garden du bar éponyme de Temple Bar. Il est 16h. Le temps est typiquement irlandais. Douze degrés, 3 minutes de soleil pour 27 de pluie et un joli arc-en-ciel.
Je parle à Mathias du programme de la soirée. J'ai envie d'aller voir un concert dans un haut lieu de la scène musicale dublinoise, appelé Whelans. Le groupe en question est une formation anglaise de pop indé dont j'apprécie le récent deuxième album et qui s'appelle Veronica Falls. Le concert est supposé commencer à 20h et il faut donc manger avant. Ceci m'aurait choqué un an plus tôt, mais après un hiver passé en Suède à déjeuner à 11h et à dîner à 18h, je commence presque à y prendre du plaisir.
Je suggère donc d'aller casser la graine dans une enseigne du coin dont la spécialité ravirait les diététiciens. Il s'agit de crêpes de pomme de terre roulées et fourrées de ragoût d'agneau, de carottes de cumin et d'une petite sauce genre tzatziki pour rafraîchir le tout.
C'est super light. Je me dis que je devrais être incapable de manger pour le reste du séjour. J'ai les dents du fond qui baignent et l'idée même d'une bière me barbouille.
Mathias a la bonne idée de prendre une part de fondant au chocolat de la taille d'une miche de pain et fait glisser tout ça avec une Murphy's, la bière qui contient l'équivalent de quatorze repas complets. Je frôle la crise de foie rien qu'à le regarder.
Nous marchons jusqu'au concert. Mathias se sent lourd. Je lui fais remarquer que prendre un dessert après ce repas copieux n'était pas forcément judicieux. Il veut un café, boisson à laquelle il attribue des vertus laxatives. Nous faisons donc étape dans un bouiboui proposant le breuvage en question dont il ne fait qu'une gorgée puis nous nous dirigeons vers la salle de concert qui n'est autre qu'un pub vraiment sympa avec une jolie scène. Un premier groupe du coin joue, franchement pas mal, et nous prenons du plaisir à les regarder depuis les canaps bien confortables en sirotant  un petit bushmills pour digérer les crêpes du dîner. Nous avançons jusqu'au premier rang pour voir les têtes d'affiche de la soirée. La chanteuse guitariste principale sauve le concert avec une énergie qui n'a d'égal que la tête d'enterrement des autres membres du groupe qui semblent avoir perdu toute leur famille 5 minutes avant le début du show. Néanmoins (et bouche en plus), je suis ravi d'être venu.
Toujours un peu fatigués et afin de ne pas louper le dernier DART pour rentrer à l'hôtel, nous décidons de rentrer nous coucher juste après la fin du concert, un petit pincement au coeur tant l'endroit était coolos.
arrivé à l'hôtel, Mathias, qui se plaignait toujours de se sentir assez lourd, pense que manger deux des petits chocolats fourrés de caramel fondu, et sur lesquels il est marqué un million de calories, est une bonne idée. Je reste sans voix. Au moment de m'endormir je prie pour que Mathias ne ronfle pas et, merci mon Dieu, mes prières semblent entendues puisque j'arrive à dormir plutôt pas mal.


Nous devons retrouver en ce vendredi notre ami Guigui à Belfast en fin d'après midi. Un rapide coup d'oeil par la fenêtre nous permet de constater à peine réveillés qu'il fait un temps magnifique. Je suggère donc à Mathias d'essayer de trouver une petite étape en chemin dans la campagne pour prendre un peu l'air profiter de la richesse de paysages que nous propose cette contrée verdoyante. Le jeune éphèbe trouve dès la première ligne du guide présent dans la bibliothèque du B&B ce qui semblerait faire l'affaire: une petite ville avec un château en ruines au bord de l'eau à la frontière entre l'Irlande et le Royaume-Uni. Nous filons donc tout droit mais en roulant à gauche vers ce haut lieu du tourisme mondial qu'est Calingford.
Certes un château en ruine il y a mais il aurait du être précisé que toute la ville est en ruines et qu'on ne peut rien visiter du tout. Cela dit, je dois reconnaître, que la vue sur la mer est plutôt jolie et dans l'ensemble l'étape est agréable. Nous décidons même d'entamer une petite marche sur les hauteur pour avoir un joli point de vue. Un vieux de l'office de tourisme nous propose un petit parcours d'une trentaine de minutes qui fait une boucle et nous emballe.
Nous commençons donc l'ascension de cette colline. Après dix minutes de marche dans de la boue qui fit regretter à Mathias d'avoir choisi une paire de chaussures blanches en toile pour son voyage en Irlande, nous croisons un charmant fermier et ses moutons à l'endroit où je pensais qu'il nous fallait bifurquer pour rejoindre la route. L'homme s'adresse à nous avec un accent irlandais ) couper au couteau que je ne comprends pas mais dont l'intonation me fait penser qu'une traduction du type "dégagez de là petits cons où je vous fous ma pioche dans le cul" serait appropriée. Nous continuons alors notre chemin sans trouver l'embranchement recherché ce qui nous pousse à faire demi-tour.
Arrivés à la voiture en sueur et couverts de boue, nous programmons le GPS vers Belfast et un restaurant bien noté sur TripAdvisor en espérant pouvoir y bouffer autre chose que de la patate frite qui dégouline d'huile. Rappelons que nous sommes au Royaume-Uni.
L'endroit est pas mal, du moins le cadre est vraiment agréable. Le truc le plus sain de la carte est un burger végétarien, servi avec des frites de patate douce. Ne soyons pas de mauvaise foi, c'était très bon. Le fromage de chèvre fondu avec les poivrons rôtis et la roquette fraîche sont un mélange que je renouvellerai pour mes incontournables Burger Parties.
Le quartier autour du restaurant, qui est celui de notre hôtel et de la Queens University est réellement charmant et à première vue, je ne comprends pas pourquoi Guigui m'avait mis en garde sur Belfast en la définissant comme le Beauvais du Royaume-Uni. Je vais très vite réaliser qu'à mon avis Beauvais est bien plus agréable.
En déposant les affaires à l'hôtel (que d'ailleurs je recommande vivement à toute personne ne pouvant éviter un déplacement à Belfast) je demande quelques renseignements à la réceptionniste. Elle me file un plan et je suis déjà heureux de constater que tout peut se faire à pieds. Elle me parle du fameux poisson sur les quais, de deux trois monuments et des chantiers du Titanic (qui je l'apprends au passage fut construit à Belfast). Je lui dis que j'aimerais voir les murals, vestiges et témoignages de l'époque des troubles. Elle prend un air de stupeur et complètement apeurée me dit de ne pas aller dans les quartiers loyalistes (surtout avec une voiture immatriculée en Irlande) si je ne veux pas quelques balafres de plus.
N'écoutant que mon courage, je décide de la croire et de rayer les murals de la liste des choses à voir.
Qu'à cela ne tienne, nous nous baladons dans la ville qui, dès que nous sortons du quartier de l'université, apparaît comme vraiment glauque. Une ville industrielle des années 70 qui n'aurait pas évolué depuis. C'est suffoquant. Une odeur de graillon flotte en permanence dans l'air et mis à part le poisson où nous retrouvons Guigui, rien ne trouve grâce à nos yeux.






Nous retrouvons Coralie une demi-heure après que Guigui nous a rejoint (j'espère, chers lecteurs, que vous savez tous que l'expression après que est toujours suivie de l'indicatif). Cette dernière nous emmène dans un pub clairement pas mal et nous essayons de trouver un endroit où dîner le soir; LE restaurant (de fruits de mer) semble complet. C'est vendredi soir. Je propose que nous tentions quand même d'y aller en leur racontant que nous avons bien une réservation au nom de Pépin et qu'il est inadmissible qu'ils ne la retrouvent pas. Mes amis n'osent pas tenter cette approche mais proposent quand même d'aller voir. Coup de bol, on nous propose une table une heure plus tard et nous allons donc tuer le temps dans un autre pub où nous découvrons le nouveau single de Daft Punk.
Le dîner est un délice. Ceviche de saint-jacques à tomber, poelée du même coquillage à la menthe sur un risotto aux asperges. Je suis conquis et me dis que tout n'est peut être pas perdu pour Belfast. Etant des petits vieux fatigués par cette journée Belfastidieuse nous prenons un taxi pour rentrer à l'hôtel, ce que j'appelle du savoir vivre.

Le lendemain matin, où nous avons normalement rendez-vous à 10h avec le petit couple, Mathias me fait son coup habituel du "vas te doucher en premier et dépêche toi que je puisse enfin y aller, on est pressés". C'est vrai que ça faisait longtemps aussi. L'idée de la journée est de longer la côte entre Ballycastle et Portstewart (où nous avons réservé un B&B) et de nous arrêter bien sûr à ma chaussée des géants mais aussi au pont suspendu Carrick-a-Rede et plus généralement dès que ça nous chante car c'est joli. Et j'avoue, la route est à couper le souffle. Les points de vue du haut des falaises et la couleur de l'eau se déchirant sur les rochers est un spectacle magnifique. 
Nous faisons une pause pique nique juste avant le pont suspensu-susnommé. Coralie a eu la gentillesse de préparer une petite collation composée de quinoa, de polenta et de choux. Ce qui apparaît comme le déjeuner d'un moine tibétain en pleine grève de la faim est aussi un soulagement pour nos transits intestinaux un peu en pleine saturation de graisse de friture et d'ailleurs l'effet sera radical pour Mathias qui ira marquer de sa présence à tout jamais les toilettes du site. 
Il faut marcher en bord de falaise un petit kilomètre avant d'arriver au pont suspendu que nous empruntons tous avec courage et dignité. Je continue de me demander pourquoi tout le monde persiste à me demander si moi aussi je l'ai bien traversé. Eh bien oui mesdames et messieurs, et avec une agilité et une classe internationales. La preuve en image. 




Une fois de l'autre côté, nous avons l'impression de regarder une carte postale. La mer scintille de reflets d'argent et le vents dans nos cheveux nous fait nous sentir en vie. Il y a même des oiseaux qui ressemblent à des pingouins. Coralie maintient mordicus que ce ne sont pas des pingouins car les pingouins ne volent pas. Je me dis qu'elle doit confondre pingouin et mouton (autre animal pas mal répandu en Irlande). Il s'agit en fait de macareux, ce qui soyons de bonne foi, ressemblent clairement à des pingouins. 
Nous filons ensuite en direction de la chaussée (aux moines) des géants. Coup de coeur immédiat. Le mathématicien en moi (qui finalement existe) est émerveillé par la présence naturelle de ces hexagones réguliers. La mer déchaînée nous éclabousse et la montagne dans notre dos ressemble au grand canyon. 
 C'est un réel spectacle que je n'ai pas peur de qualifier de grandiose, d'époustouflant et qui vaut à lieu seul le voyage en Irlande du Nord. J'accepterais même de retourner à Belfast pour le revoir, c'est dire.
Le retour au parking se fait par l'ascension d'une falaise qui, en plus d'être une marche extrêmement agréable, n'en demeure pas moins sportive et finit de nous achever pour cette journée passée au grand air.
D'un commun accord, nous quittons l'endroit pour aller se reposer au B&B avant de dîner. L'hôtel est une petite maison charmante avec vue sur une grande plage de sable jaune qui me rappelle la côte girondine. Les chambres sont douillettes et la propriétaire, élue clairement MILF de l'année consécutivement de 2008 à nos jours est charmante. Elle nous réserve une table dans un restaurant où nous mangerons de délicieux filets de bar frais et sa confiture maison d'oranges amères à la cannelle qu'elle propose au petit déjeuner est un délice.

Pour ce dernier jour, nous avons le projet de visiter Londonderry avant de déposer Guigui et Coralie à Belfast (mais de ne surtout pas s'y arrêter) et d'aller passer avec le frangin une dernière nuit à Dublin.
Londonderry ou Derry est une ville fortifiée qui fut le théâtre du tragique Bloody Sunday  qui inspira la chanson de U2. C'est aussi une ville fortifiée où une balade le long des remparts, pour peu que l'on ait vraiment à s'y arrêter, peut s'avérer agréable. Fidèle à lui même, Mathias laisse son empreinte dans les toilettes d'une sandwicherie où, pendant ce temps, je me compose avec brio un en-cas léger à base de poivron mariné, de dinde et d'oignon nouveau devant la stupeur de la vendeuse ne comprenant pas que je n'y rajoute pas un demi pot de mayonnaise. Je déteste tout particulièrement la mayonnaise.  
Nous repartons vers Belfast puis vers Dublin où nous arrivons à 19h. Cette fois l'hôtel est super central et nous permet de découvrir quelques rues bardées de pubs et de restaurants géniaux. 
J'enfile une chemise. Mathias me rappelle qu'il est inutile d'essayer de me faire beau, je reste Marcello le balafré. Nous commençons par un petit bar à vins et une assiette de charcuterie. C'est quand même autre chose que les onion rings et la sauce barbecue. Puis, après un délicieux filet de veau de lait aux morilles dans le très prisé Peploes, nous repartons à la conquête du temps qu'il nous reste et enchainons les verres de Bushmills qui dans un pub avec un concert de musique traditionnelle irlandaise (au secours), qui dans un sous sol en écoutant de la bossa nova, qui dans un bar à concerts où nous tapons l'incruste et où Mathias remplit à merveille son rôle de pique assiette en mangeant les petites cassolettes de pommes de terre que lui brandit un (canard) laquais. Nous rentrons complètement saouls à l'hôtel vers 2h du matin en réalisant que nous devons nous lever 4h plus tard pour attraper nos avions respectifs.

Au réveil, je suis frais comme un gardon et fier de constater que malgré mon âge avancé, l'alcool ne me fait toujours rien. Mathias, en revanche, semble accuser le coup. C'est avec un timing parfait que dégustons un délicieux petit déjeuner et déposons la voiture à l'aéroport avant d'embarquer. Le vol est mouvementé, pas mal de vent et de turbulences, si bien que jamais ne s'éteindra le signal Keep your seatBELFASTen mais c'est en survolant la mer du Nord que je me perds dans un sommeil profond dont je ne me réveillerai qu'arrivé à Stockholm où, pendant mon absence, la glace a fondu et le printemps semble enfin s'installer.




jeudi 2 mai 2013

Un printemps pas français




Nous sommes le 1er mai. Bon ok, peut être que lorsque ce message sera publié le calendrier aura un peu avancé mais bon, licence temporelle accordée, nous sommes le 1er mai, je suis toujours en Suède et justement, hier nous fêtions Valborg.

Vous vous demandez alors, chers lecteurs non initiés à la culture et aux traditions nordiques, de quoi je parle. Et bien en Suède, comme dans une poignée de contrées barbares, est célébrée la fin de l'hiver au moyen de gigantesques feux allumés dans toute la ville - que dis-je le pays ?! - et autour desquels la population, en majorité de sortie ce soir là avec marmaille et compagnie, se retrouve pour faire griller quelques saucisses et accessoirement une sorcière ou deux. En effet, cette petite sauterie a lieu exactement six mois après Halloween et, même si apparemment la symbolique de l'évènement diffère selon les suédois, tout le monde s'accorde sur l'origine païenne du truc.

Pour moi qui dit sorcière, dit chasse aux sorcières et en ce printemps mouvementé en France, toutes ces idées s'entrechoquent et font écho dans mon esprit qui tourne en permanence à une vitesse folle.
Ne voyant pas l'intérêt de continuer à défendre le mariage pour tous et jeter de l'huile sur des cendres, je ne réouvrirai pas ce débat dont l'existence même m'a profondément choqué.

J'avais, dans un précédent bulletin, fait une petite critique du précédent roman de John Irving et, considérant ce dernier comme un de mes auteurs préférés, je ne pouvais passer sous silence la sortie de son nouveau roman A moi seul bien des personnages. Si la concupiscence est un sujet plutôt récurrent chez l'auteur (il est clair que si vous n'avez pas encore lu Le monde selon Garp, je me demande pourquoi vous n'êtes pas partis en courant à la Machine à Lire ou toute autre librairie de bon goût), la façon de traiter le désir de ce nouveau roman m'a beaucoup surpris.
Le narrateur, William (je précise ici - me doutant que chaque détail sur ma personne vous ravit - que j'aime beaucoup les romans écrits à la première personne), est un jeune garçon sans père, élevé dans une famille du Vermont dans les années 60. Toute la famille est investie dans la troupe théâtrale et/ou dans l'établissement scolaire du patelin. Lorsqu'un nouvel enseignant metteur en scène débarque en ville et séduit la maman - aimable comme une porte de prison - de notre jeune héros, ce dernier - au seuil de l'adolescence - prends conscience d'un désir contre-nature envers celui qui devient son (beau)-père et s'inquiète de ses erreurs d'aiguillage amoureux qu'il essaiera de comprendre et d'apprivoiser au moyen de toute une littérature qui arrivera entre ses mains grâce à la bienveillante Miss Frost, bibliothécaire attentionnée.
Il s'agit donc de l'histoire et de la vie d'un garçon qui apparaîtra comme bisexuel dans la Nouvelle-Angleterre de la seconde moitié du siècle dernier. Le récit est carrément super cru mais jouit d'une force et d'une justesse qui m'ont beaucoup touché (bouleversifié comme dirait ma mère).

C'est un peu le sujet du très beau film de Xavier Dolan, Laurence Anyways, dont je conseille également le visionnage. Xavier Dolan vient justement, aujourd'hui Jeudi 2 Mai (je vous avais dit qu'on ne resterait pas le 1er Mai longtemps!) de présenter sa dernière réalisation: le clip du nouveau single d'Indochine qui traite de la difficulté d'intégration d'un jeune garçon différent dans un pensionnat pour garçons. Le clip, d'une violence inouïe n'en reste pas moins d'une beauté bouleversante et j'encourage mes fidèles lecteurs et autres détracteurs éternels du groupe susnommé à le regarder et à réfléchir quant à cette violence devenue partout banale.


En 1985, année marquée par ma venue au monde - je me permets de le rappeler à nos plus jeunes lecteurs - Indochine chantait 3ème sexe (et son fameux "c'est bientôt la chasse aux sorcière"). Toutes ces références cultes pour moi se rejoignent enfin en ce délicat printemps 2013. Le présent s'harmonise comme dirait le narrateur de l'excellent 22/11/63 de Stephen King (dont la lecture est impérative).

La mariage pour tous est voté. La neige a fondu à Stockholm et le ciel est d'un bleu profond. Espérons alors que l'hiver est bel et bien terminé.

vendredi 11 janvier 2013

C'était bien, souviens toi...





Chers amis, vous m'avez manqué et je ne doute pas un seul instant que moi aussi. Nous nous étions quitté il y a presque un an, même jour même heure même... Non, gardons quand même le clou de girofle du spectacle pour plus tard.
Après le succès indéniable de nos deux précédents séjours au ski avec mon ami Atlantic Gabs, nous voulions renouveler l'expérience en conviant, à titre exceptionnel, un couple (deux personnes de sexe opposé qui semblent avoir des rapports plus qu'amicaux) de jeunes gens a priori sympathiques, j'ai nommé Nico A. et Anna P. Cette idée ayant été mentionnée au cours d'un dîner dont je n'ai que quelques vagues souvenirs, elle semble avoir germé dans l'esprit des personnes susnommées puisque je reçois un message courant Novembre d'Anna me demandant - je cite - de transformer leurs vies en un film hollywoodien comme je l'eus fait précédemment avec notre ami conducteur de car. N'écoutant que mon coeur chevaleresque, je répondis  hélico presto - lol - de manière positive à cette requête que me redonnerait l'occasion de faire ce que se fait de mieux en manière d'évenementiel et de virilité.
Après quelques heures d'intense réflexion, je décidai donc de faire une proposition pour un séjour en Espagne dans la magnifique station ensoleillée de Baqueira-Beret du cul. Plus précisément, je proposais un hébergement dans un appartement mansardé, 3 pièces, Sdb, prox. commodités de la charmante bourgade d'Artiès, à 5km de la télécabine et bardée de bars à tapas.
Mes amis sont naturellement conquis par cette offre éblouissante et nous décidons donc de partir du 3 Janvier (jour de fête nationale dans plus de 20 pays) au 6 du même mois.
Le temps passe et nous convergeons à la vitesse d'un cheval au galop vers la date fatidique.
Décidant de déléguer un petit peu - à tort - l'organisation du séjour, je suggère une liste de courses non exhaustive - mais de première necessité -  incluant entre autres du beurre (naturellement aux cristaux de sel de mer, sinon ça s'appelle une plaquette de gras) et des barres de céréales, que nos amis décident délibérément, envers et contre tout, de ne pas provisionner.
Je décide, en ma clémence intérieure, de passer l'éponge. Errare humamum est, après tout.
La veille du départ, nous nous retrouvons tous pour une dégustation de pizzas et un départ synchronisé aux premières lueurs.
La nuit se passe. Je partage mon lit avec Gabs qui remue de tout son corps comme s'il était possédé. Je me garde bien de craquer une allumette dans la chambre. La teneur en méthane de la pièce me semble anormalement élevée comme l'indiquent les capteurs qui me servent de narines. Je dors 3h.
Néanmois - et bouche en plus - excité comme une puce à l'idée de dévaler des pistes à la vitesse de la lumière, je suis le premier debout, et le seul à me laver soit dit en passant.
Nous sommes 4 et étant chargés comme des mulets, nous partons à deux voitures. Gabs ayant eu de la chance au tirage, se retrouve en ma compagnie et celle des meilleurs groupes de pop de 2012 dont nous chantons les morceaux à tue-tête sur la route.
Après 30 kilomètres d'autoroute, le jeune éphèbe se rend compte qu'il a oublié tous ses papiers - incluant permis de conduire et pièce d'identité.- et ses lunettes de soleil. Je ne le félicite pas. Autant que sa rétine soit brûlée par le soleil qui nous attend sur les pistes ne me fait ni chaud ni froid, autant l'idée d'être arrêté à la frontière et de perdre du temps de ski me chagrine atrocement. Je suis impitoyable et décide de ne pas faire demi-tour. Advienne que pourra. Alea jacta est comme on dit en Suède.
Vers la fin du parcours autoroutier, id est aux 3/4 du parcours, une pause pipi est réclamée par les enfants qui nous accompagnent. L'occasion de prendre un café. Gabs est intrigué et tenté par le menu du chauffeur routier - un autre membre de cette grande famille que sont les conducteurs de poids lourds - qui consiste en un velouté de tomate dans lequel est trempé une chocolatine. Je ne m'étonne plus de rien. Tous les mauvais goûts sont dans la nature. Etrangement, une réorganisation des équipes s'opère et je me retrouve avec Anna qui me raconte une histoire charmante à propos du récent concert de Matthieu Boggaerts à Angoulême. Je ne fais pas attention à ce qui se trame dans la voiture de derrière, que j'ai du mal à voir dans mon rétroviseur tant j'ai l'impression qu'elle recule.
Nous passons la frontière et aucun comité d'accueil, ni tapis rouge. Pour un 3 Janvier, je suis surpris. Cependant, les festivités nous attendent plus loin car plusieurs policiers charmants - qui doivent travailler à Guantanamo à leurs heures perdues - nous arrêtent au rond point.
M'ayant tout de suite reconnu, les forces de l'ordre s'inclinent et me laissent passer en me souhaitant un joyeux anniversaire. Il n'en est pas de même pour la deuxième partie du convoi.
Gabs avait pris le volant, sans papiers, sans chemises, sans pantalon. Et avec la barbe naissante d'un clandestin syrien. Les deux comparses subissent donc une immobilisation de véhicule plutôt logique.
Après 15 minutes d'arrêt, je réalise que j'aurais eu le temps de descendre 3 pistes rouges et je décide de tenter le tout pour le tout. Je me pointe avec mon grand sourire. Ne parlant pas un mot d'espagnol, je comprends tout de suite que le rottweiler en uniforme me demande de dégager vite fait si je ne veux pas mourir dans une cellule avec un bout de pain sec et de l'eau croupie.
Ils ne rigolent pas de ce côté des Pyrénées et je commence à envisager le pire. Devoir rammener Gabs en France et revenir, ce qui transformerait ce séjour supposé idyllique en véritable Baqueira-Berezina.
Contre toute attente, les flics espagnols relâchent les joyeux drilles et nous voilà repartis vers la neige et le soleil.
Deux membres de notre équipée voulant à tout prix s'exercer sur le parcours débutant, nous décidons de nous garer directement au plus haut - secteur Beret basque - et skier sur cette partie du domaine en ce premier jour. Après un repas sain et léger composé de sandwiches à la grosse saucisse espagnole suintant le gras et au fromage fondu, nous voilà partis, Gabs et moi d'une part - sur les pistes pour adultes - et Anna et Nico de l'autre. Je suis ravi de retrouver mes sensations sans douleur aucune au niveau de ma cheville qui avait été salement amochée au printemps dernier. Gabs quant à lui semble peiner - je veux dire, plus que d'habitude - à descendre les pistes avec aisance et rapidité. Je mets ça sur le dos du manque de pratique et sur l'absence de visibilité due, me semble-t-il, à l'absence de lunettes sur le nez de mon ami.
La journée se termine bien. Nous retrouvons le petit couple et partons en destination d'Arties pour faire le check-in dans l'appartement que nous avons loué. Seulement, il y a un hic. Nous ne sommes pas les seuls à être venus skier à Beret en ce jeudi ensoleillé. Apparemment toute l'Espagne a eu la même idée, et il ne nous faut pas moins de 1h40 pour redescendre les 5 km qui nous séparent de la bourgade où nous sommes supposés prendre nos quartiers. Ce qui énerve Anna et l'effraie pour le reste du séjour, que nous vivrons dans la hantise la plus totale d'avoir à subir à nouveau des bouchons. Ce qui est apparemment le pire truc du monde.
L'appartement est coquet. Nous réservons une session sauna et jacuzzi pour le lendemain soir et prenons un petite douche avant de sortir nous gaver de tapas de vin rouge.
Arties est une très jolie petite ville toute en pierre, avec un petit pont, une petite place et un petit bar à tapas charmant, dont la qualité et la diversité me font encore saliver rien qu'à l'écriture de ces quelques lignes.
Dans la vie il y a deux types de personnes. Celles qui choisissent les tapas qui ont l'air bonnes, à bases de crevettes, de jambon ibérique, de noix de saint jacques ou de sardine fumée et les autres. Ceux qui choisissent par exemple la tapas composée de vache qui rit panée et de confiture de framboise, ou bien le morceau de pain recouvert d'une couche de mayonnaise avec des morceaux de thon en boîte. Je vous laisse deviner dans quel groupe je me trouve, au contraire de Nicolas. Je peux vous dire, à titre d'indice que je ne suis pas dans le deuxième. La soirée est une réussite, ce qui est aidé par le fait que 3 verres de vin et une bière sont facturés 5€ le tout. Vive l'Espagne.
Nous nous couchons, épuisés, saouls mais content à l'idée que ces vacances ne font que commencer.
Nous sommes un peu moins contents quand le réveil sonne à 7h30 - idée d'Anna pour éviter les bouchons - et qu'il faut préparer les sandwiches, se doucher (enfin en ce qui me concerne) et tout simplement sortir du lit. Mais bon, la skiette nous reprend assez vite et un regain d'énergie parcourt nos sens. Chacun prépare ses propres sandwiches. Certains avec brio et d'autres avec de la mayonnaise, voire pire.
En moins de temps qu'il n'en faut pour se moquer d'Anna, nous revoilà sur les pistes, secteur Baqueira la panthère noire (je me sentais obligé de caser la blague de Gabs mais vous avouerez volontiers que ce calembour n'est pas des plus heureux).
Nous skions la matinée en groupes séparés et nous retrouvons pour déguster ensemble, en altitude et face aux montagnes et au soleil, les sandwiches susmentionnés. Ceux de Gabs sont sécos et je ne peux m'empêcher de lui proposer de préparer les siens en échange du port du sac à dos pour le reste du séjour, ce qu'il accepte bien entendu. Pas folle la guêpe.
D'un commun accord, nous entamons l'après-midi tous ensemble, ce qui nous permet d'observer nos amis et leurs techniques. Si Nicolas, bien que débutant, ne demande qu'à progresser, Anna quant à elle a mis au point une technique plus proche de l'optimisation du bronzage facial que de la descente. En effet, plutôt que de glisser dans l'axe de la piste, elle choisit de placer son snowboard perpendiculaire à la descente le visage sous les rayons de notre étoile. Afin de garder son espace vital intact, elle écarte les bras, tel le (Lionel) Messie sur la croix.
Une autre particularité de nos amis, bien pratique est le sac à dos rose bonbon que porte Nico dans son dos et qui nous permet de le repérer sur les pistes et même mieux de s'en servir comme déclencheur pour nos courses.
"- Bon Gabs, quand le sac rose aura franchi le canon à neige et qu'on ne verra plus Nico, ce sera le top départ. Le premier en bas sera bien sûr le gagnant. Veux-tu que je te laisse un peu d'avance ?
- Non non, je vais essayer de faire de mon mieux
- Bon tu feras quand même Gabs à ne pas percuter de petit enfant hein!"
Vous vous doutez bien que j'avais douze fois le temps de m'acheter une bière ou un cornet de frites le temps que Gabs me rejoigne en bas mais je ne désespère pas de le voir s'améliorer d'années en années.
Sous une pression certaine, nous devons arrêter notre journée pour éviter les bouchons qui s'avèrent inexistants en ce deuxième jour de ski.
En arrivant à l'appartement, Suzanne la réceptionniste, nous annonce qu'il y a un problème avec le jacuzzi et qu'il se pourrait que la température soit un peu froide mais que nous pouvons néanmoins profiter du sauna, ce que nous ne nous privons pas de faire.
Nous sommes donc quatre, nos corps transpirant et la chaleur détendant nos muscles et nos organes vitaux dans cette cabane de bois, chaude de 80°C et je me retrouve à nouveau en Suède. C'est d'ailleurs pourquoi je propose de nous la jouer à la nordique en enchainant le sauna avec le spa dont le température n'est que de 20°C. Bon normalement il faut creuser un trou dans la glace mais ça fera très bien l'affaire, me dis-je.
Tout le monde se prête à l'expérience sauf une personne qui a la trouille de plonger son corps dans une eau à 20°C. Par pudeur je ne mentionnerai pas son nom. Je peux juste dire qu'il ne s'agit ni d'Anna, ni de Nico ni de moi.
Nous continuons ensuite le thème du voyage, à savoir l'alimentation équilibrée. Après moult sandwiches, pizzas et tapas, rien de tel qu'une bonne raclette pour remettre de l'ordre dans nos transits intestinaux.

En ce troisième jour, nous laissons à nouveau Nico et Anna souffler un petit peu et skier de leur côté pour basculer du côté de Beret où, incroyable mais vrai, nous nous retrouvons seuls. Pas une personne au télésiège, ni sur les pistes. C'est un régal. Le soleil est éclatant et nous descendons les pistes avec volupté. Gabs a un orgasme sur le télésiège. Entre deux séances de drague des petites espagnoles à l'aide d'une technique un peu douteuse ("OOOOOOOOOOOlaaaaaa como que tal chica ?") il me confie
"- Ah qu'est ce que c'est bon.
-  Tu l'as dit, toi toi mon Gabs!
- Il faudrait se refaire ça chaque année, même jour même heure même moment"
Dernière réplique qu'il balance sur l'air du fameux morceaux de Patrick Bruel.
" - Alors mon petit Gabs, au delà du fait que je serais ravi de faire du ski dans de telles conditions et en ta délicieuse compagnie chaque année et que je passe sur tes références musicales douteuses, les paroles de la chanson c'est même jour même heure même pomme!
- Mais pas du tout! Ecoute, moment ça rentre bien!"
Le fou rire me gagne. Et la lumière arrive. Je repense à cette B.D très drôle de Gotlib, intitulée Si les pommes étaient citrouilles et je trouve le running gag de la fin du séjour. Remplacer le terme pomme par le terme moment à chaque fois qu'il devrait être employé.
Je raconte tout ça à Nico et Anna qui rigolent et décident de s'en donner à coeur-joie.
 "- Bon Gabs en descendant la prochaine piste, tu feras attention, il y a un groupe de petits enfants, hauts comme trois moments et ça serait dommage de les renverser. Il pourraient tomber dans les moments."
"- Ah je viens d'avaler de travers, j'ai super mal au moment d'Adam!"
Bref, la grosse blague à laquelle Gabs, non dénué d'auto-dérision, participe de bon coeur.

Le dernier jour est encore meilleur que le précédent. Nous retournons au secteur Beret qui est encore plus vide que la veille et Nico descend avec nous. Ses progrès sont épatants, il descend déjà plus vite que Gabs et aurait donc sa première étoile facilement. Nous nous en payons en bonne tranche tous les trois jusqu'à tard dans l'après-midi quand le soleil déclinant nous indique qu'il est déjà l'heure de rentrer chez nous et reprendre le cours de nos vies.
C'est donc, avec de belles images en tête que nous nous enfonçons dans le brouillard de l'autoroute qui nous conduira jusqu'à chez nous, nos esprits déjà submergés de nostalgie pour toutes ces bonnes pommes passées tous ensemble,





dimanche 4 mars 2012

Mistaken for Magic

Nous sommes un dimanche classique de fin février. Je déguste quelques huîtres sur la glace, face à la dune du Pyla et les rayons du soleil caressent mon doux visage. Banal. Soudain, un coup de téléphone vient troubler la quiétude et la monotonie de cette fin d'hiver:

"-Ouais, allo c'est Gabs, dit mon interlocuteur, hyper enthousiaste, presque excité.
-Oui je sais ça s'affiche quand tu m'appelles. Que me vaut ce plaisir ? (le suspense est à son comble.)
-Je ne travaille pas les trois jours qui arrivent.
-Alors c'est vraiment hyper intéressant et j'ai très envie de le noter, mais j'ai terminé mon petit carnet et comme on est dimanche j'ai pas pu encore en acheter un nouveau, tu pourras me rappeler pour me le dire ?
-Pauvre type! Je te dis ça pour t'informer que je vais pouvoir me coucher après 20h30 et regarder ça cartoon ce soir jusqu'à la fin.
-Putain mais c'est carrément de la folie furieuse, j'espère que tu l'as relayé sur twitter, facebook et sur copains d'avant! Bon et tu voudrais pas en profiter pour aller lécher un peu de givre au ski plutôt ?
-Ah mais c'est une super idée, j'y avais même pas pensé. Merci de rendre mon quotidien si magique.
-C'est un métier, Gabs. Bon, je m'occupe des formalités. Il me faudra une autorisation de sortie de territoire signée par tes parents s'il te plait."

Ni une ni deux, je plie les gaules (de toute façon, un nuage avait eu le mauvais goût de se pointer et de me voler MON soleil) et je file me connecter sur mes sites préférés (après YouPorn, évidemment). Je trouve un hébergement parfait pour emmener Gabs: "cadre romantique et chaleureux au pied des pistes du plus grand domaine skiable des Pyrénées, avec peau de bête dans la chambre, massage et spa". Je sais par expérience (les lecteurs assidus ont encore en tête l'épisode de la saison précédente à Cauterets de la montagne) que mon acolyte aime les soins corporels en tous genres et j'opte par conséquent pour ce choix dont je me félicite.

Je rappelle mon compagnon et lui donne rendez-vous le lendemain, à 6h au rond point de la boulangerie talençaise de la biche, où je le retrouve après une nuit trop courte. Le GPS indique 3h58 de route, 4h en gros hein, pour rejoindre Soldeu, Andorre, et je décide de prendre le volant en premier, afin de roupiller en deuxième partie de trajet pour être frais sur les pistes. Gabs n'y voit que du feu et accepte.

Le jeune éphèbe me fait la conversation. Majoritairement à base de calembours et autres jeux de mots douteux, mais relativement drôles. "Alors j'aimerais savoir s'il y a des soldes, et où ?". Nous rencontrons des bouchons sur le périphérique toulousain, qui nous retardent une bonne heure. A chaque jeune fille dans une clio, nous klaxonnons. Sans succès. J'aurais du me raser la barbe, je le savais.

Néanmoins, et bouche en plus, nous continuons notre route de plus belle et changeons de conducteur vers Foix de morue. Assez rapidement je m'endors. Je me réveille peu avant le passage de la douane. Rémi transpire. Il a les mains moites. Je le rassure en lui expliquant qu'il n'est pas illégal de ne prendre qu'une douche tous les trois jours et que les douaniers ne s'en rendront même pas compte. Il se calme et nous passons sans embûche de Noël Gallagher.

Nous arrivons à Soldeu, le soleil est là et l'excitation est à son comble. Les chambres ne sont évidemment pas prêtes. Ces feignasses de femmes de ménages préfèrent sûrement fumer au soleil. Bref, nous nous changeons dans des toilettes. Un homme entre, nous voit en caleçons nous tartiner mutuellement de la crème. Il est gêné et ressort aussitôt. Nous sommes fins prêts. Un checking horaire nous suggère de prendre une collation rapide avant d'aller skier pour profiter au maximum des activités de sports d'hiver pour lesquelles nous sommes venus jusqu'ici.

Un sandwich en terrasse, d'une valeur d'un mois de loyer, plus tard, nous chaussons, qui nos skis, qui notre snowboard et prenons le télésiège débrayable 6 places en bas de l'hotel et c'est parti pour une journée de folie.

La neige n'est pas d'une qualité fantastique mais il en faut plus pour effacer les sourires sur nos visages angéliques. Pendant que je descends rapidement quelques pistes rouges pour me chauffer, Gabs fait du chasse neige sur le parc baby pour reprendre son niveau. Une fois que nos muscles répondent présents, plus rien ne peut nous arrêter jusqu'à la fermeture de la station.

Alerte i-Gabs: lorsqu'une station est en fait composée de cinq secteurs, relativement loin les uns des autres, penser à se rapprocher du secteur dont on dépend assez tôt pour éviter de faire 25 km à pied de nuit en chaussures de ski.

Heureusement, cette alerte arrive sur mon téléphone à temps et nous évitons de justesse la catastrophe. Un petit Spa nous ferait alors le plus grand bien. La blonde de la réception ne parle pas un mot de français et je décide de ne faire aucun effort dans la mesure où elle vient de m'indiquer que non seulement le spa est en supplément prohibitif, mais qu'il faut réserver et disposer de ses propres tongs. Ce séjour sera donc (à) sec, Gabs fait la grimace.

Nous montons dans la chambre et nous relaxons chacun sur nos lits, sans aucun contact physique. Je travaille un peu sur mon ordi à des choses importantes pendant que mon ami dort comme un bébé. Dès son réveil nous décidons de prendre une douche et d'aller consommer une boisson gazeuse à base d'alcool et de houblon, dans le lobby de l'hotel sur d'énormes canapés qui m'ont fait un effet boeuf (qui sera le thème de la soirée) lors de mon arrivée.

Je suis saoul en une minute et dix-sept secondes, montre en main. Gabs y voit un lien direct avec le sport de la journée, le peu de sommeil et l'absence de nourriture dans notre organisme. Je trouve qu'il va vite en besogne mais accepte néanmoins son incitation subtile à partir en quête d'un haut lieu de la gastronomie locale où nous restaurer. Deux anglais (qui sont apparemment une population bien représentée dans le coin) nous indiquent une adresse good for steak. Exactement en accord avec les signaux envoyés par mon estomac. L'endroit est cosy malgré une serveuse qui est plus proche d'une porte de prison qu'une employée de restaurant. Gabs et moi commandons la même chose. Un verre de rouge. Une salade de boeuf thaï à la coriandre entrée et un filet de boeuf au poivre en plat. Ils n'avaient pas de sorbet au boeuf ces cons. Pas de dessert du coup. Le repas est un festin délicieux qui ravit nos papilles et nourrit nos organes en manque de forces mais la digestion aussi vite entamée nous frappe d'un violent coup de barre.

Cela ne nous empêche pas de tenter de partir à la rencontre de la nuit andorrane. Le premier bar propose un groupe de rock qui fait des reprises de Kings of Leon à un volume sonore qui, non content d'empêcher toute communication, détériore les tympans. Bref, nous filons à l'autre bar, nommé Aspen.
"Aspen arrivé qu'on a envie d'en partir" s'écrie Gabs lorsqu'il découvre avec stupeur qu'un concours de l'anglais le plus moche est organisé dans ce bar par une blonde à tête de musaraigne. Nous faisons un billard en disposant les boules de manière alétoire car c'est plus drôle. Gabs met assez vite la noire dans le trou. Un ange passe. Il propose d'aller dans un endroit plus calme où on peut s'assoir confortablement et boire une tisane avec un actifed nuit.
Nous arrivons donc rapidement dans le lobby de l'hotel où Gabs reprend avec euphorie les titres d'Elton John joués au piano. Le sommeil me gagne et je file vite au lit.

Le lendemain, un petit déjeuner fantastique nous est proposé, comprenant des oeufs de la charcuterie ibérique ou encore du pamplemousse frais. Un régal. Le ciel est d'un bleu profond et le soleil brille de mille feux. Une journée de rêve nous attend. La nuit a été bénéfique et je sens que mon corps a envie de m'obéir complètement.

C'est parti. Nous prenons le télésiège, apprenons qu'on peut chasser le chamois en Andorre en automne, que Ricardo Bofill est un super architecte et descendons comme des marioles des pistes noires comme l'ébène. Gabs me propose une course.
Je lui demande s'il veut que je mette des raquettes à la place du snow pour qu'il ait une chance de gagner. Il décline ma proposition généreuse.
"-Tu vois ce petit enfant en chasse neige qui a l'air de passer un bon moment sur cette piste noire ?
-Oui, oui.
-Quand il aura atteint le canon à neige, ça sera le top départ."

J'en profite pour prendre deux cafés en bas de la piste et pisser un coup le temps qu'il arrive. La journée est à l'image de cette descente. Rapide. Ephémère. Je ne la vois pas passer, les descentes s'enchaînent plus vite que l'éclair et nous nous surprenons de l'agilité et de la facilité avec lesquelles nous glissons dans la neige immaculée de chèvre. Sur chaque télésiège nous chantons de bon coeur le nom de différents dictateurs sympathiques, sur l'air du dernier single de Chairlift.

Nous regardons ma montre (Gabs a douze couches de gants et ne peux donc pas regarder la sienne). Il est déjà l'heure de se rapprocher de notre secteur. Pas le temps de comprendre ce qu'il se passe, nous sommes déjà dans la voiture. Une larme coule sur le visage de mon copilote. La rêve prend fin. Je le rassure. Ce ne sera pas le dernier. Nous reviendrons. La montagne est à nous. Le monde est mondial.
Gabs se calme et me murmure

"A Tampa le dernier moment pour me faire rêver de nouveau".

vendredi 4 mars 2011

Sortez couverts mais rentrée littéraire


Quatre ans après la parution de son précédent roman, Je te retrouverai, les éditions du Seuil nous offrent, en même temps que tous les éditeurs qui sont apparemment incapables de répartir les sorties sur l’année - appelez ça la rentrée littéraire - le dernier opus du très talentueux John Irving.

Je ne taris pas d’éloges à propos du bonhomme. En effet, je suis un grand grand fan des romans de l’américain même si je n’aime pas tout, mais je crois qu’il ne serait pas plus mal de refaire un petit topo sur l’auteur.

John Irving est un homme charmant, né en 1942 (d’ailleurs c’était son son anniversaire mercredi et j’ai complètement oublié d’envoyer un SMS..) dans le New-Hampshire, en Nouvelle-Angleterre, région chère à son coeur, dans laquelle se déroule une bonne partie de ses oeuvres. Je passe un peu sur sa période primaire où il jouait aux billes (bah forcément, il n’y avait pas de Pogs..) mais John devient un champion de lutte au lycée et c’est un des thèmes récurrent dans sa bibliographie. Il passe par l’atelier d’écriture de l’Iowa où il est en particulier coaché par Kurt Vonnegut, auteur comme tout le monde le sait de grands livres que je n’ai pas lus. Bon, jusque là je ne connaissais pas du tout cet atelier, apparemment très réputé aux States, mais il se trouve que le détail à de l’importance si vous lisez la suite de cet article. Bref, Johnny sort son premier roman Liberté pour les ours à l’age de 25 ans. Il s’agit de deux l’histoire deglinguée de deux jeunes déjantés qui font le tour des zoos de la vieille Europe et décident de libérer les ours comme le titre l’indique.

D’un point de vue perso, je n’ai pas aimé ce roman là ; je le trouve difficile à lire tant les dialogues partent dans tous les sens et finalement pas très passionnant. En revanche, le roman qui a vraiment lancé Irving dans le cercle des auteurs de best sellers (et non pas des poètes disparus), Le Monde selon Garp, est une véritable merveille et on voit tous les mécanismes et thèmes d’Irving se mettre en place : émancipation des femmes (Garp est mis au monde et élevé par son infirmière de mère qui seule se débrouille pour tomber enceinte et devient la "première" grande féministe), la Nouvelle-Angleterre des années 60, Vienne, les ours, le rapport père-fils et les craintes liées à la paternité et surtout la concupiscence, thème majeur de ce roman passionnant et très dense.

Depuis, plusieurs très grands livres ont suivis dont, pour citer mes préférés, L’Hotel New Hampshire, Une Veuve de papier ou Je Te Retrouverai. C’est donc avec grande impatience que j’attendais Dernière nuit à Twisted River dont la sortie aux Etats-Unis date de Novembre 2009. Parlons-en, donc.

Il est souvent reproché à Irving de doubler le nombre de pages de ses histoires et de perdre le lecteur en digressions diverses. S’il est en effet toujours un peu difficile de rentrer dans ses romans (les chapitres font au minimum quarante pages et le premier est toujours un peu rébarbatif) je trouve qu’en général le passage pénible est de courte durée et qu’une fois à l’intérieur, il devient impossible impossible d’en ressortir. Cependant, cette fois-ci, je dois reconnaître que je me suis demandé, lors de la lecture des cent premières pages si je ne tenais pas un exemplaire de la collection Que Sais-je ? sur l’Histoire et l’Evolution du transport fluvial de bois et des bûcherons qui le découpent. Certes il s’agit là du contexte dans lequel on veut nous faire rencontrer les personnages et une description précise de ce contexte aide à la compréhension de ces personnages. Mais quand même. On a tendance à lutter contre le sommeil. Et c’est dommage, car comme d’habitude les personnages sont incroyables, fouillés et extrêmement attachants.

Il y a Dominic le cuistot, qui boite et qui élève seul son fils de douze ans après que sa femme (une tendre cousine) se soit noyée dans la rivière. Il couche avec Jane, la grosse indienne que Dany, le jeune fils en question, confond accidentellement avec un ours. Il y a Ketchum, le bûcheron bourru qui semble lié par on ne sait quel accord tacite à Dominic et qui veille sur eux. Il y a Tombe du ciel, jeune parachutiste nudiste et féministe esquintée par la vie. Et tant d’autres personnages d’une force incroyable que l’on va rencontrer au cours de ce roman, dense, qui nous raconte la vie de ce père de son fils et du fils du fils.

Le livre ravira les inconditionnels de John Irving, car en plus d’aborder les thèmes chers à l’auteur et déjà mentionnés plus haut (paternité, tout ça...) il fait le lien entre des choses vécues par Irving et par Danny (qui devient écrivain dans le livre). Ainsi Danny participe à l’Atelier d’écriture de l’Iowa et est guidé par Kurt Vonnegut. Il écrit un roman sur l’avortement suite à une expérience dans une clinique à la frontière avec le Maine (ce qui n’est pas sans rappeler un autre roman d’Irving, L’Oeuvre de Dieu ; la part du Diable). Tous ces détails donnent une grande cohésien à ce roman là mais aussi à l’Oeuvre d’Irving en général.

Finalement, une fois qu’on a enfilé sa chemise à carreaux et qu’on a passé le début difficile du roman, on reste sous le charme - et le joug ! - de cette nouvelle histoire toujours pleine de mélancolie, de vie ratée et qui nous rappelle, comme le dit si bien Dominic, que l’on vit tous dans un monde d’accidents.

mercredi 12 janvier 2011

Zone d'Ecoute Prioritaire #1


En avant première mondiale, je vous propose de découvrir le premier bulletin de la toute nouvele chronique que j'écris pour l'excellent site DEAD ROOSTER.

Les acronymes c’est cool et ça permet de faire genre on est hyper occupé et hyper tendance. Souvenez vous, lorsque vous avez téléphoné à votre ami Jean-Louis, enseignant :

  • "Salut Jean-Louis, ça roule ?
  • Ah salut mec, ouais ça va mais depuis que je suis TZR dans la région PACA j’arrête pas ! D’ailleurs je dois te laisser, on se rappelle ASAP !"

Bref, vous aurez compris, les acronymes sont hype. Du coup, en cherchant un nom pour ma nouvelle, et toute première, chronique, dont l’objet est la présentation de groupes franco-francophones, j’ai trouvé cette petite référence à l’éducation en milieu défavorisé plutôt chouette. Certains vont penser que je sous-entends que vos oreilles ont besoin d’aide particulière. Ce n’est pas tout à fait faux.

Pour ce premier billet, je vais vous parler des EPs de deux formations françaises que j’affectionne particulièrement.

Les propriétaires d’iPhone l’auront peut-être constaté, mais lorsque vous écrivez un Short Message System (ou SMS pour utiliser encore un acronyme !), le logiciel d’écriture intuitive remplace automatiquement LA (respectivement MA) par LE (respectivement ME). Sachez que je n’écris pas cette article avec un logiciel de la pomme et que donc, et malheureusement, LA FIANCEE n’est pas la mienne mais une jeune et charmante chanteuse qui nous livre une musique folk intime et légère portée par une voix claire et douce.

Depuis à peu près un an, Claire de son prénom, nous propose à cadence régulière des florilèges de chansons d’une grande qualité, dont certaines composées par le génialissime Florent Marchet. L’opus qui nous intéresse ici, troisième d’une série de quatre et nommé simplement Trois, rassemble une sélection irréprochable de reprises interprétées avec brio. On s’émerveillera sur la version cabaret du Bien Avant de Benjamin Biolay, on remuera du popotin sur le titre oublié Tout ce qui nous sépare de Jil Caplan mais on aura commencé à vibrer dès l’Ouverture d’Etienne Daho. Le mélomane averti aura donc constaté la présence des fins fleurons de la pop, courant musical que La fiancée semble bien avoir épousé.

La deuxième galette que je voulais vous présenter ici n’est pas celle dite des rois mais plutôt d’un quintette français, recruté sur Myspace et qui porte curieusement le nom d’une station thermale allemande. J’ai nommé Baden-Baden. Si le titre Anyone affole un peu la blogosphère depuis quelques temps et a valu à la formation parisienne quelques bons papiers de ci de là, je n’ai pour ma part découvert le groupe que très récemment, en achetant comme tout le monde l’EP à la fnac. Pour rester dans un registre francophone, car c’est un peu le but de la chronique, je n’hésiterais pas à dire qu’on se retrouve à la croisée de groupes comme Montgomery, Malajube ou encore Girls in Hawaii. Nous sommes en présence de six chansons qui alternent entre l’anglais et la langue de Molière. Les morceaux du début de l’opus sont de véritables bijoux de finesse (Anyone, 78) et il est carrément jubilatoire de passer du sourire des premières notes de Ukulélé de TV aux riffs de guitare puissants de la fin du morceau. Les paroles de l’excellent Alice risquent de vous trotter dans la tête un certain temps. Un bon bain de pop, en somme.

Les microbes ne me font rien

Chers amis et Gabs bonsoir.

Nous sommes en 2011. Bon ça, a priori vous le savez: votre crise de foie liée aux excès des fêtes s'est transformée en une sympathique gastro, ce qui vous a permis, entre autres, d'occuper le temps aux toilettes à éplucher les différents cadeaux de Noel (qui pour la plupart, resteront stockés dans cette même pièce) - comme ce magnifique ouvrage sur les 1001 façons de construire une niche de chien en osier ou encore ce poster avec un camion - voire un car - et une tête de loup à l'oeil brillant.

Une nouvelle année commence de manière générale, et très globalement, par le mois de Janvier. Ce mois est plutôt cool. Déjà parce qu'il contient le jour le plus important de l'année, mon anniversaire, dont la célébration reste une ode à la charcuterie (en particulier au Serrano de Bergeras - brevet de blague en cours de dépôt) mais aussi car je n'ai pas grand chose d'autre à faire qu'aller au ski ou faire des jeux.

Les mauvaises langues que vous êtes vont faire semblant de s'indigner quant à cette déclaration qu'ils jugeront provocatrice mais c'est la vérité. J'ai été débordé et vous, lecteurs assidus de ce blog, vous en êtes rendus compte puisque vous m'avez réclamé à corps et à cris de nouvelles publications. Alors accrochez-vous parce que ça décoiffe.

Dans la voiture qui me ramène du ski,nous écoutons une compilation de type musical sur laquelle un morceau capte mon attention. Et alors à ce moment là du récit, votre esprit est inondé de questionnements "Quoi il était au ski ? et avec qui ? et c'est quoi ce morceau génial qu'il va encore nous faire découvrir et pour lequel nous lui serons encore plus redevable d'exister ? etc..."

Commençons donc par le commencement.

Comme je vous le signalais plus haut, je n'ai pas grand chose à faire. Il fait froid. Il fait moche (enfin pas à Bordeaux, car il il y fait toujours beau). J'ai envie de changer d'air. Du coup, je me dis qu'un peu de glisse sur un revêtement blanc, humide, souple et pas trop dur serait tout indiquée. Et je ne parle pas du pénis de Gabs. Je parle de ski, bien entendu. Et justement, vendredi 7 Janvier, 14h38, coup de fil.

"OOuuuUUiiII EEuuUUhh c'est GAaaBbs je suis dans mon car là, je transporte des petits enfants aveugles à une expo de peinture, c'était pour te dire que je travaille pas lundi"

Marcello : "Ah bin attends, je le note dans mon carnet qui recense tous tes faits et gestes depuis Avril 1998"

Gabs : "Pauvre type! c'était pour te dire que je serai libre pour que tu illumines une de mes journées"

Marcello : "Tu travailles aussi dimanche ou bien t'en branles pas une deux jours consécutifs ?"

Gabs : "Non non, j'ai deux jours à ton entière disposition"

Marcello (choqué par si peu d'activité professionnelle) : "Et si on allait au ski du coup ?"

Gabs : "Ah super, j'adore le givre"

Etant spécialiste de l'évènementiel, je m'occupe de l'organisation du séjour. En moins de deux, hôtel réservé dans la charmante bourgade de Cauterets. Ah, Cauterets, ses pistes de ski, son casino, ses thermes... Au moyen de mon véhicule personnel, nous nous rendons, avec l'ami susnommé dans la station de ski susnommée en empruntant la nouvelle autoroute de la vieille Pau en 2h50 montre en main et chibre à l'air.
Nous sommes donc en mesure de pratiquer qui du ski, qui du snowboard pour les plus virils d'entre nous. Après que Gabs ait loué son matériel pour enfants chez Bernard Sports Tifs (articles de sport et haute coiffure pour hommes, femmes et enfants), nous rejoignons le domaine (moyennement) skiable du cirque du Lys où nous sommes carrément sous le blizzard. On y voit rien. On se croirait à Abidjan (à ce propos petite blague d'actualité : Qu'est ce qui pourra arrêter Laurent Gbagbo ? Un Iceberg bien entendu!).
Cela ne nous empêche pas de remonter la piste et de la descendre en 10 minutes alors que les télésièges si lents qu'on dirait qu'ils reculent mettent 15 minutes juste pour remonter.
Au terme d'une journée fort épuisante, nous nous détendons en slip de bain aux thermes (vous remarquerez comme ce bulletin est bien écrit). Une bière dans une chouette brasserie et Gabs s'endort à son heure habituelle (20h52). Je ne tarde pas à l'imiter après avoir lu deux chapitres de mon livre actuel (Les anonymes de RJ Ellory auteur du très bon Seul le silence dont j'ai déjà parlé ici). Nous nous réveillons le lendemain autour de 7h46. J'ai une haleine de chacal (j'ai oublié ma brosse à dents et Gabs refuse de me prêter la sienne - qu'il croupisse en enfer!).
Après un petit déjeuner frugal, et en ayant éviter de croiser le proprio de l'hôtel qui a tendance à vous tenir la jambe pendant dix mille ans pour vous parler des photos de son fils qui est un pro du ski et surtout pour vous dire que si vous passez sur un caillou après votre planche c'est une étagère, rien d'autre, nous reprenons la télécabine pour nous rendre en haut de la montagne. Il fait un temps magnifique et c'est un pur bonheur.
La visibilité me laisse le plaisir de voir enfin Gabs skier, ce qui est un spectable en soi. Jean-Marie Bigard à côté, c'est de la pisse. La journée est donc une fois de plus intense. Gabs a le plan avec la serveuse de la cafet', Jeanine, jeune blonde décolorée de 58 ans. A partir du moment où nous ne sentons plus aucun de nos membres, nous décidons d'arrêter et de descendre de la montagne (pas à cheval). Il est 16h34. Le temps de se changer, de régler les formalités de départ (la caution de Gabs pour avoir montré sa bite), nous sommes dans la voiture à 17h30 et nous prenons l'itinéraire qui mène à Bordeaux car c'est plus pratique que celui qui mène à Toulouse si on veut rentrer chez nous.

Et donc, sur ce trajet du retour, perdu dans mes REMIniscences de ce week end qui s'achève (on dirait une chanson de Roch Voisine, dédiée à Rémi), je suis sorti de mes pensées par un morceau que je trouve super.

"Putain c'est quoi ce morceau Gabs c'est hyper bien ?!"

Gabs (l'air réprobateur) : "je vois que tu n'es pas très attentif aux samplers du magazine Magic, il s'agit de Baden Baden"

Marcello : "le groupe ou la station thermale ?"

Gabs : "pauvre type! le groupe"

J'avais déjà lu ce nom un paquet de fois dans les magazines spécialisés des spécialistes du genre mais n'avais jamais pris le temps d'écouter la formation française. Du coup hier, Mardi, lendemain du retour du ski, je file à la fédération nationale d'achat des cadres (fnac pour les intimes) et bim j'achète une galette des rois. Mais non voyons, la galette des rois je l'achète à la boulangerie ! Et par galette, j'entends briochée, il m'est inutile de le préciser, un peu comme pour le beurre qui est toujours salé vu que je ne vois pas l'intérêt du beurre doux.
Bref, à la fnac j'achète l'EP de Baden Baden, qui se nomme 78 et dont je vous recommande à tous l'écoute et dont la chronique détaillée fera l'objet d'un post un peu plus tard.

Je vous laisse, le film va commencer.